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Le secrétaire général des Nations Unies annonce un comité constitutionnel en Syrie

  • par Kilian Cochet
  • 08 oct., 2019

Traduction d’un article du 23/09 du journal Al Jazeera 

[Diplomatie multilatérale/Droit international] 

Avant-propos :

Le conflit connu sous le nom de Guerre Civile Syrienne, débuta en 2011 à la suite du Printemps Arabe. Contre le gouvernement Baathiste de M. Al-Assad, des rebelles ont pris les armes. Il s’agit de différentes factions de jihadistes, de milices ethniques (notamment turkmène, au nord, formant le gros de l’opposition, mais aussi Kurdes, au nord-est du pays) et plus globalement d’opposants. Des puissances étrangères participent aussi à la guerre. Le gouvernement turque soutient les milices ethniques turkmène et occupe la frange nord du pays. Israël occupe le plateau de Golan au sud depuis la Guerre des Six Jours de 1967. Les Etats-Unis, la France, le Royaume-Uni, et leurs alliés, assistent les rebelles kurdes au Nord-Est. Enfin, l’Iran et la Russie soutiennent le gouvernement de la République Arabe Syrienne. Ces supports sont principalement militaires.

            Pour les Syriens, il s’agit principalement du conflit entre ceux qui considèrent le gouvernement du Président Al-Assad légitime, et ceux qui souhaitent le destituer ou obtenir leur indépendance vis-à-vis de celui-ci. Le comité constitutionnel annoncé par le secrétaire général des Nations Unies pourrait être un pas supplémentaire vers la paix.

 

Le secrétaire général des Nations Unies annonce un comité constitutionnel en Syrie

 

Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a annoncé la création d’un comité constitutionnel pour la Syrie qui comprendra des membres du gouvernement du Président Bachar al-Assad ainsi que des représentants de l’opposition.

L’annonce de ce Lundi vient une semaine après que M. Guterres ait annoncé qu’un accord avait été trouvé concernant « la composition du comité ».

« J’ai le plaisir de vous annoncer qu’un accord a été atteint entre le gouvernement de la République Arabe Syrienne et la Commission des Négociations Syrienne permettant la création d’un comité constitutionnel crédible, équilibré, et inclusif qui sera tenu à Genève sous l’égide des Nations Unies, » a déclaré Guterres la veille de la 74ème Assemblée Générale des Nations Unies (UNGA) à New York.

« Je crois fermement que l’ouverture d’un comité constitutionnel organisé et mené par les Syriens peut être le début d’une résolution politique [du conflit] ».

 

« Ils ont gagné la guerre »

 

Cependant Joshua Landis, directeur du centre d’études du Moyen Orient de l’université d’Oklahoma, a déclaré à Al Jazeera qu’il était « dur d’avoir de l’espoir » quant à la viabilité du comité.

« Le gouvernement Syrien a fait preuve d’autorité et a dit que seuls les Syriens décideront du futur de la Syrie… Il a gagné la guerre, il est peu vraisemblable qu’il autorise des puissances étrangères ou l’ONU à changer grandement sa constitution » affirme Landis.

James Bays de Al Jazeera, en reportage au siège des Nations Unies à New York, nous informe que l’ONU été confiante quant à l’avancée de ce processus après avoir surmonté les problèmes initiaux de composition.

« Ils ont finalisé la liste des participant la semaine dernière, et elle a été accepté lors d’une conférence en Turquie par les dirigeants de la Turquie, de la Russie, et de l’Iran, » affirme Bays.

« J’ai parlé au secrétaire général peu après cet évènement et il m’a dit qu’il pensait qu’un accord avait été conclu. Mais pour être sûr que le gouvernement syrien en était bien un acteur, il a dépêché son envoyé spécial à Damas ».

 

Finaliser l’accord

 

Plus tôt ce Lundi, l’envoyé spécial des Nations Unis Geir Pederson a rencontré le ministre syrien des affaires étrangères pour discuter des principaux problèmes liés à la formation du comité.

L’agence de presse officielle de Syrie, la SANA, a déclaré que la réunion du ministre des affaires étrangères Walid al-Moallem avec l’envoyé spécial Pederson s’est concentré sur la composition du comité et sur les garanties contre les « interventions étrangères ».

Moallem a été cité, expliquant que Damas aura le droit de continuer à combattre le « terrorisme dans le respect » du droit international.

La Syrie est plongée dans la violence depuis 2011, quand les manifestants en faveur de réformes démocratiques ont été réprimé.

Un cessez-le-feu est rentré en vigueur fin Aout, interrompant la grande offensive du gouvernement contre la province d’Idlib au nord-ouest, principalement contrôlé   par le groupe Hay’et Tahrir al-Sham, connecté à al-Qaeda.

L’envoyé spécial Pederson a ajouté qu’il avait aussi pris contact avec Naseral-Hariri, qui dirige le comité représentant l’opposition syrienne.

Une précédente tentative avait été effectuée en 2018, quand un conférence de paix syrienne hébergée par la Russie avait convenu de la création d’un comité de 150 membres chargés de rédiger une nouvelle constitution. Il s’agit d’un autre pas vers la résolution politique du conflit syrien qui a déjà fait près de 400 000 victimes.

 

En complément, un extrait d’un article de Arab Weekly en date du 21/09, commentant l’accord conclu par les dirigeants Russe, Turque, et Iranien ainsi que la position des Etats-Unis :

 

Tandis que le comité constitutionnel syrien voit le jour, les Etats-Unis sont toujours absents.

 

[…]

L’accord conclu par les trois dirigeants prévoit que le comité sera composé de 150 membres : 50 du gouvernement, 50 de l’opposition, et 50 indépendants représentant la société civile. L’opposition et le gouvernement co-présideront le comité, et les décisions seront prises à la majorité qualifiée des deux tiers.

Damas a causé un retard en s’opposant à la nomination de six membres de la société civile en affirmant que, bien que supposément neutre, il s’agissait de sympathisants de l’opposition, choisi par l’envoyé spécial des Nations Unis Staffan de Mistura. L’opposition a objecté l’inverse. Il a été décidé qu’à la place de ces six noms, quatre personnes supplémentaires seront désignées par le gouvernement et deux par l’opposition.

La Turquie a montré son opposition à un délégué du gouvernement syrien, Daham Hadi al-Jarba, un chef tribal arabe du nord-est de la Syrie qui co-dirige le canton de Jazira pour les Forces Démocratiques Syriennes, soutenues par les Etats-Unis. Ankara affirmait qu’il était trop proche des kurdes, et souhaitait son remplacement. Cette demande a été rejetée à la conférence des trois dirigeants.

L’année dernière, des juristes russes ont présenté une ébauche pouvant faire office de projet constitutionnel, la diffusant à travers divers organisme de presse pour jauger la réaction du public. Sa discussion par le comité est encore incertaine, d’autant plus que l’opposition comme le gouvernement s’y oppose.

Le projet russe supprimait l’article 3 qui spécifiait que la religion du président Syrien devait être l’Islam. Cette clause est présente dans tous les textes constitutionnels syriens depuis 1920.

Les islamistes de l’opposition s’y sont vivement opposé, demandant sa restauration et affirmant qu’un chrétien ne pouvait diriger un pays musulman. Cela peut servir le gouvernement qui se présente comme protecteur des minorités.

Les Ba’athistes n’étaient pas satisfaits par le projet russe car il changeait le nom du pays de « République Arabe Syrienne » à « République Syrienne », affirmant que cela apaiserait et conforterait les non-arabes de Syrie, tels que les Turkmènes, les Circassiens, et plus spécialement les Kurdes. Ils étaient aussi vivement opposés au retrait de certains pouvoir du président comme la nomination de son premier ministre

[…]

Le genre de constitution qui émergera de ce comité ne fait pas partie des priorités du président des Etats-Unis Donald Trump qui va bientôt rentrer dans l’année des élections. Ses priorités ont davantage été l’éradication de l’Etat Islamique, l’émancipation des Kurdes, ainsi que d’affaiblir l’emprise de l’Iran sur la Syrie. Que Assad reste ou parte ne change rien pour lui, il est prêt a accepté n’importe quelle conclusion, même si celle-ci convient parfaitement à Vladimir Putin.

 

Enfin, un article de Asharq al-Awsat, en date du 24/09, traitant la question kurde :

 

L’Administration Autonome dirigée par les Kurdes ne se préoccupe pas du comité constitutionnel.

 

Le département des Relations Etrangères de l’Administration Autonome de la Syrie du Nord et de l’Est (NES) a annoncé ce lundi ne pas se préoccuper de l’issue de la formation du comité constitutionnel syrien du fait de son exclusion et de l’absence de participation de ses représentants aux réunions.

Une délégation du Conseil Démocratique Syrien (SDC), dirigé par le dirigeant Kurde Ilham Ahmed, est en train de discuter avec Washington de la formation d’un comité constitutionnel et de la sécurité des frontières.

Dans une déclaration faites sur son site officiel, l’Administration Autonome de la NES a mis en avant sa volonté de créer un dialogue national en Syrie avec la participation de toutes les parties syriennes.

Cette déclaration rappelle le poids politique de la NES, qui parle au nom de millions de personnes.

Constatant l’absence de représentant de l’Administration Autonome et du SDC au comité constitutionnel syrien et aux discussions pour les accords de paix, Abdul Karim Omar, co-président du bureau des affaires étrangères de l’administration kurde, a déclaré à Asharq Al-Awsat que la rédaction d’une constitution avec la participation de tous les Syriens était un enjeu majeur.

« Cependant, l’absence de n’importe quel partie signifie l’absence de démocratie dans la constitution » a-t-il déclaré.

« Nous, à l’administration, pensons que notre exclusion des efforts menés pour trouver une solution politique et particulièrement de la réforme de la constitution est injuste. »

Omar affirme que la prolongation du conflit, la poursuite de la crise en Syrie et l’échec de tout retour à la stabilité est dû à « l’absence de solution politique et de consensus syrien ».

Rappelons que l’Administration Autonome contrôle la majeur partie de l’est de l’Euphrate depuis qu’elle en a chassé les combattants de l’Etat Islamique.

[…]

 

par Eva Beauvois 22 mars 2022
 La religion musulmane, qui regroupe près d’un milliard et demi de fidèles, repose sur plusieurs dimensions touchant l’Homme au sein de sa société et de son époque : les dimensions théologiques et juridiques. Néanmoins, il existe une dimension de l’Islam qui permet, et incite, l’individu au détachement de son environnement pour se recentrer sur sa seule unicité avec Dieu : la dimension spirituelle, notamment matérialisée par la philosophie du soufisme. L’étymologie du terme, apparu vers la fin du IIe siècle de l’hégire, reste obscure. C’est notamment sur le mot sūfī qu’est formé en arabe tasawwuf (تصوّف) , littéralement « l’adoption des valeurs et des rites soufis », que le français a traduit par « soufisme ». De façon générale, il est néanmoins possible de le caractériser comme la recherche de la sagesse intérieure, visant à se rapprocher de façon évolutive de Dieu par de nobles vertus. La présentation de ce travail idéologique d’espérance du meilleur sera l’objet de cet article.
par Jâd Delozanne 8 mars 2022
L'art de l'Espagne islamique est un fantasme orientaliste depuis que Washington Irving l'a redécouvert pour le monde occidental dans ses délicieux Contes de l'Alhambra, écrits en 1832. Mais la citadelle et le palais du XIIIe siècle, situés au sommet d'une colline surplombant Grenade, sont non seulement les monuments les plus connus de l'ère musulmane en Espagne, mais aussi les plus grands trésors de cette période. Les Omeyyades, ou Umayyades, (en arabe : الأمــــویــــون sont une dynastie arabe qui gouverne le monde musulman de 661 à 750 puis al-ʾAndalus de 756 à 1031. Ils tiennent leur nom de leur ancêtre ʾUmayyah ibn ʿAbd Šams, grand-oncle du prophète Mahomet. Ils font partie des clans les plus puissants de la tribu de Qurayš, qui domine la Mecque. Al-Andalus était la partie de la péninsule ibérique sous domination musulmane. La péninsule ibérique désigne l'Espagne et le Portugal actuels. Dans sa plus grande extension géographique, Al-Andalus a placé sous son califat la majeure partie de la péninsule, l'actuel sud de la France et les cols alpins reliant l'Italie à l'Europe occidentale. Les musulmans ont régné sur la majeure partie de la péninsule jusqu'à la fin de la dynastie des Omeyyades au début du 11e siècle.
par Julien Groux 8 février 2022

 Considérées individuellement, les économies nationales ne semblent pas avoir été affectées de la même manière par la récession économique liée à la crise sanitaire. Celle-ci a montré les forces et les faiblesses, les capacités d’adaptation et de résilience, révélé les particularités de chaque économie. La crise est un moment où tout bascule, où apparaît un dysfonctionnement majeur. Si elle peut être une période de troubles, la crise peut aussi être un kaïros, un moment à saisir pour savoir et comprendre. Parce qu’elle révèle le réel , elle est une occasion formidable de s’interroger sur le fonctionnement d’une société. Pour dire simplement comme le fait le philosophe Charles Pépin, « c’est quand cela ne marche pas que nous nous demandons comment cela marche ». Ainsi, la crise sanitaire en ce qu’elle expose les singularités propres à chaque système économique conduit ici à s’intéresser, à travers la finance islamique, à la relation qu’il existe entre religion, notamment l’Islam, le droit et l’économie.

Alors que l’Islam était pour Max Weber un obstacle au développement économique, la finance islamique est aujourd’hui en plein essor. Relativement récente, elle a pour point de départ la création de la Banque islamique du développement en 1974 qui fait la promotion du développement économique dans les pays musulmans. Les banques occidentales s’intéressent à la finance islamique qui, bien que s’adressant en priorité aux musulmans reste ouverte sur le monde. La finance islamique passionne par son appartenance à une industrie financière éthique remise en lumière par la crise des subprimes de 2008. Les principes religieux s’inscrivent dans le droit qui régule l’activité bancaire islamique.

par Sofia Locquet 1 février 2022
En 1854, un diplomate français, Ferdinand de Lesseps, obtient l’autorisation de la part du khédive Mohammed Saïd de creuser et d’exploiter le canal maritime de Suez pendant 99 ans. Ce firman ouvre la voie à la création de la Compagnie de Suez, concession qui illustre l’intervention des puissances européennes en Égypte. Reliant la Mer Méditerranée et la Mer rouge, situé entre l’Europe et l’Asie, le canal est un lieu géostratégique majeur qui va servir à la fois les intérêts régionaux et commerciaux de l’Égypte ottomane et l’impérialisme européen.
par Eva Beauvois 7 décembre 2021

La culture marocaine s’exporte de plus en plus grâce à la mondialisation et ses relais, tels qu’internet et les médias. Le roi Mohammed VI a par ailleurs proposé depuis le début de son règne une politique étrangère fondée sur le libre-échange des biens, services et arts ainsi que sur le dialogue avec nombre de pays européens. Cette ouverture progressive tend à favoriser toutes les couches de la société marocaine ainsi que ses manifestations artistiques, comme celle qu’est le rap.

Cette évolution du rap marocain profite à l’entièreté du monde arabophone et à son économie. Elle se justifie par la véritable ascension d’une unité artistique puissance. Néanmoins, les premiers acteurs de cette puissance, les artistes, font face à certains obstacles politiques et institutionnels censurant leur art ou leur empêchant de gagner décemment leur vie. Fort heureusement, les supports médiatiques et leur source inépuisable de créativité permettent aux artistes marocains de faire porter leur art le plus loin possible et aux oreilles des plus chanceux. L’objectif de cet article est de témoigner de l’élévation de la culture rap marocaine sur une grande scène, celle du Maroc et potentiellement celle de l’Europe ainsi que de la volonté sans faille des artistes marocains.


par Housni Ahamada 16 novembre 2021
 Dans la continuité de son programme Vision 2030, le Royaume d’Arabie Saoudite a, le 25 août 2021, annoncé le lancement d’une série de partenariats, d’une valeur de plus de 4 milliards de riyals saoudiens (900 millions d’euros), avec les plus grandes entreprises technologiques du monde. Selon Saudi Press Agency, les objectifs fixés par le royaume sont d’améliorer les capacités numériques, de se doter d’une main d'œuvre qualifiée en encourageant la recherche et le développement afin de faire du pays un hub mondial de l’innovation numérique.

Ce récent évènement montre l’ambition de l’Arabie Saoudite, mais plus généralement des pays arabes, dans la course mondiale à l’innovation technologique et plus particulièrement dans le secteur de l’intelligence artificielle. Machine learning, deep learning, voitures autonomes, reconnaissance faciale, villes intelligentes et même robots pour certains ; les grandes puissances de ce monde sont entrées dans une course à l’innovation dans l’intelligence artificielle, considérée comme la quatrième grande industrialisation. Bien que selon Neil Sauvage, du Nature 2020 Index Artificial Intelligence, la Chine, les Etats-Unis et l’Europe se partagent le podium des leaders mondiaux du domaine, les pays arabes ne veulent également pas non plus rater cette opportunité estimée selon la société d’audit PricewaterhouseCoopers, à 15 700 milliards de dollars de contribution à l’économie mondiale d’ici 2030 dont 320 milliards pour la région Middle East North Africa.

 Dans cette folle course à la nouvelle industrialisation, trois pays se distinguent dans le monde arabe par leur potentiel à s’imposer comme de futurs hubs de l’intelligence artificielle dans la région. Ce sont les Emirats arabes Unis, l’Arabie Saoudite ainsi que l’Egypte. En effet, selon les recherches du PwC, la part estimée de l’IA d’ici 2030 dans le PIB des Emirats Arabes Unis est estimée à 13,6%, presque autant que les économies d’Amérique du Nord dont la part d’ici 2030 est estimée à 14,5%, à 12,5% pour l’Arabie Saoudite et enfin à 7,7% pour l’Egypte. Toutefois, ces prévisions réjouissantes ne sont que des prévisions et il s’agit maintenant aux concernés de mettre en place tout ce qu’il y a en leur pouvoir pour les réaliser. Signe révélateur que le message a été reçu : les gouvernements saoudiens et émiratis ont placé l’IA au centre de leurs stratégies économiques avec, respectivement, le programme Vision 2030 pour l’un, et le programme Artificial Intelligence Strategy 2031 pour l’autre. Le gouvernement égyptien a également donné une priorité à l’IA dans sa stratégie économique en voulant la développer au maximum.

Mais quelles sont réellement les raisons qui poussent ces gouvernements à donner autant d’importance au développement de l’IA ? Quels sont les moyens mis en place ? Y a -t-il déjà des résultats ? Ont-ils vraiment les moyens de leurs ambitions ? Quels sont les obstacles ?

Il s’agira de montrer dans cet article comment l’IA placée par ces gouvernements ambitieux en tant que priorité nationale entraîne la mise en place de projets pharamineux, devant toutefois faire face à des obstacles politiques et technologiques.

L’ intelligence artificielle : une priorité de gouvernements ambitieux

Quelles sont les raisons poussant les gouvernements arabes à investir dans l’intelligence artificielle ?

Un « cadeau empoisonné » . Voilà comment maintes économistes décrivent la rente pétrolière et gazière sur lesquelles reposent les économies du Golfe et ce en raison de la volatilité des prix de ces énergies mais également en réponse au développement constant d’énergies alternatives prêtes à supplanter les gaz et le pétrole. Il est urgent pour l’Arabie saoudite ainsi que pour les EAU de préparer la diversification de leurs économies afin de préparer leur économie à une nouvelle ère. L’investissement dans la technologie de l’IA représente donc une voie logique à suivre en ce qu’elle représente une opportunité de plus de 320 milliards de dollars pour les 10 ans à venir. De l’autre côté, l’ Egypte possède une économie certes diversifiée, mais qui se doit de redécoller après les nombreuses crises politiques de cette dernière décennie ayant paralysées le développement économique du pays. L’IA représente une voie privilégiée par son potentiel: d’ici dix ans, elle est susceptible de rapporter près de 43 milliards de dollars pour le pays.

Comment investissent-ils dans l’intelligence artificielle ? Quels sont les moyens mis en place ?

 De ces constats, les gouvernements ont fait du développement de toutes les technologies liées à l’IA des priorités nationales.

 Ainsi, en Arabie Saoudite, la stratégie gouvernementale pour l’IA se fonde principalement sur le projet Vision 2030 de diversification de l’économie. À celui-ci, s’ajoute un programme du nom de National Strategy for Data and AI (NSDAI) révélé en octobre 2020 à Riyadh lors du sommet Global de l’IA. L’objectif affiché par Riyad est de transformer pour 2030 le pays en hub mondial de l’intelligence artificielle en réformant totalement tous ses secteurs économiques afin de devenir “IA compatible”. Cette initiative gouvernementale s’accompagne donc de nombreux investissements du Fond Public Saoudien d’Investissement dans les industries, les secteurs privés et dans la mise en place de partenariats publics-privés en vue de développer l’intelligence artificielle. Cette année par exemple, le pays a formé des partenariats avec Google, Amazon et Oracle dans le but de, selon Saudi Press Agency, mettre en place des “programmes de formation" pour les étudiants saoudiens. L’objectif est ambitieux et les moyens de cette stratégie gouvernementale sont colossaux.

 Lors du sommet global saoudien de l’intelligence artificielle, le Président saoudien de l’Autorité des données et de l’intelligence artificielle a déclaré : « La stratégie nationale pour les données et l'IA définit l'orientation et les bases sur lesquelles nous allons libérer le potentiel des données et de l'IA pour répondre à nos priorités de transformation nationales et faire de l'Arabie saoudite une plaque tournante mondiale pour les données et l'IA. »
Quant aux Emirats Arabes Unis, la stratégie gouvernementale pour l’IA repose sur le programme Artificial Intelligence Strategy 2031 révélée en 2017. Le but affiché est d’accompagner la transformation digitale du pays pour faire des EAU un hub mondial de l'investissement dans l’intelligence artificielle dans de nombreux secteurs d’une manière “intelligente” et “éthique” en créant un système numérique intelligent pour le centenaire du pays en 2071. De ce fait, le pays a été le premier dans le monde à mettre en place, en 2017, un ministère consacré spécialement à l'IA aux côtés de la création de la Muhammad Ben Zayed University of Artificial Intelligence afin de répondre aux ambitions affichées.
Enfin, en Egypte, le gouvernement a, en 2019, instauré le Conseil National pour l’Intelligence Artificielle dans une logique de partenariats public-privé entre le gouvernement, les universités et les secteurs privés de l’IA. L’université Kafr El Sheikh a ouvert une faculté de l’IA sous l’impulsion gouvernementale. L’objectif affiché par le Ministère des Technologies de l'Information et de la Communication est d’identifier par la recherche les secteurs prioritaires nécessitant l’IA afin de mettre en place un système de l’IA “durable” et “intelligent” dans l'optique de donner au pays un rôle de “leader régional de l’IA”.
par Jean-Baptiste Dubois 20 octobre 2021

Propos introductif


 Au-delà du fait que Djibouti se situe sur le continent africain, ce pays mérite d'être abordé dans le cadre d'une analyse sur le monde arabe. En effet, les divers enjeux qui se jouent autour de ce territoire méritent une attention toute particulière pour comprendre une partie des dynamiques politiques actuelles dans le monde arabe. 

À ce titre, l’ambition djiboutienne de siéger au sein du conseil de sécurité de l’ONU, pour 2021-2022, témoigne de la volonté de son gouvernement de s’imposer sur la scène internationale et d'y représenter une voix africaine. Cette ambition s’inscrit dans le jeu de puissance qui s'opère au sein de ce territoire, mais avant d’aller plus loin dans les explications sur les motivations animant les dynamiques de ce pays, il convient d’apporter quelques éléments de définition et de contexte.

Tout d’abord, sur le volet géographique, Djibouti a une superficie de 23 200 km². En comparaison, celle de la France est de 643 801 km. Les villes principales de Djibouti sont Ali Sabieh, Dikhil, Arta, Tadjoura et Djibouti qui est la capitale du pays. Les langues officielles sont le français et l’arabe. La devise est le franc djiboutien (1€ = 208 FD, en 2018). Djibouti recense une population de 1 000 000 d’habitants en 2017 selon la Banque mondiale. Elle enregistre une croissance démographique de +1,6%/an. Un peu plus de la moitié de la population est alphabétisée (54,5% en 2015) et la religion majoritaire est l’Islam (96% du pays selon France Diplomatie). Avec son PIB de 1,97 milliard de US$, Djibouti se place au rang de la 49e puissance économique du continent africain sur 54.

Toutefois, Djibouti présente un intérêt des plus stratégiques, à savoir, sa position sur le détroit de Bab-el-Mandeb, un des corridors les plus fréquentés au monde qui contrôle l’accès à la Mer rouge. De surcroît, Djibouti est situé au cœur de l’arc de crise qui s’étend du Sahel au Moyen-Orient. Ses nombreuses crises régionales démontrent l’instabilité de la péninsule, d’où un certain engouement des puissances étrangères à intervenir en son sein.

Mais est-ce vraiment la raison primordiale ? Ces puissances étrangères sont-elles réellement motivées par la volonté de stabiliser cet État et sa région ? Ou bien ces interventions et cette présence extérieure attestent seulement d’une volonté de contrôler et de servir au mieux des intérêts qui façonnent le jeu des États ? Djibouti, au fond, ne serait-elle pas qu’une pièce maîtresse dans la conception prochaine du Moyen-Orient et du Sahel ?

Bien que ces interrogations soulèvent des questions fondamentales voire propices à des débats animés, il est nécessaire d’apporter des éléments historiques (I) dans le but d’identifier les raisons pour lesquelles les puissances extérieures agissent en son sein (II) qui viendront façonner un futur plus ou moins incertain pour la République de Djibouti et pour le Moyen-Orient (III).

par Jean-Baptiste Dubois 24 mai 2021
Le monde arabe est loin d’être un élément figé aussi bien physiquement qu’idéologiquement. Dans une société caractérisée par des mouvements incessants de flux et d’échanges, s’intéresser à la diffusion de dogmes trouve toute sa pertinence pour mieux saisir les enjeux qui façonnent cette partie du globe. C’est dans cette logique que l’association Assas Monde Arabe se penche sur la question du terrorisme islamique au Mozambique.
par Seki Courcoux 11 mai 2021
Les membres d'Assas Monde Arabe se présentent à vous, à-travers les ouvrages sur le Monde Arabe qui les ont marqués.
par Killian Cochet 23 avril 2021

En 2005, pour le 60e anniversaire de l’ONU, l’Assemblée Générale des Nations Unies a écrit une page déterminante de l’histoire du droit international. Par un vote unanime, les Etats membres ont adopté dans l’acte final du Sommet mondial un concept promu depuis des années par des juristes et des acteurs humanitaires internationaux : la responsabilité de protéger (souvent abrégée en R2P pour Responsability to Protect). Cette responsabilité impose aux États et, le cas échéant, à la communauté internationale, de protéger les populations contre les crimes graves qui peuvent être commis à leur encontre.


La responsabilité de protéger a marqué une évolution décisive dans la conception juridique des relations internationales. L’espace supranational est régi depuis près de quatre siècles par le “système westphalien”, tiré du Traité de Westphalie de 1648 qui conclut la Guerre de Trente Ans. Ce système est caractérisé par une double définition de la souveraineté des Etats : une souveraineté externe qui s’exprime par une égalité de droit entre les Etats et une souveraineté interne qui confère à chaque Etat une autorité exclusive sur sa population et son territoire. Ce système a connu un important développement au XXe siècle, particulièrement concernant la souveraineté externe. De l’Entre-Deux-Guerres à l’issue de la Deuxième Guerre Mondiale, divers acteurs ont tenté de donner sa pleine puissance au concept de souveraineté externe en mettant “la guerre hors-la-loi” (Expression du ministre des Affaires Etrangères français, Aristide Briand, lors de sa présentation du pacte Kellog-Briand à l’Assemblée Nationale le 1er mars 2029), que ce soit par le Pacte Kellog-Briand ou par la Charte des Nations Unis. En revanche, le volet interne de la souveraineté demeurait l’angle mort du développement sécuritaire des Nations Unies. A l’exception de la Convention pour la Prévention et la Répression du Crime de Génocide de 1948, peu de règles internationales régissaient les rapports entre un Etat et ses populations.


Néanmoins, à la sortie de la Guerre Froide, les conflits intra-étatiques et la protection des droits humains sont redevenus un enjeu majeur du droit international. Les années 1990 sont marquées par deux crises humanitaires que sont la guerre civile de Yougoslavie (1991-2001) et la guerre civile Rwandaise (1990-1994) qui prit un tournant génocidaire dans sa dernière année avec le massacre de près de 800 000 Tutsis et Hutus accusés de sympathiser avec l’ethnie massacrée (Rapport de l’ONU sur le génocide au Rwanda, 1999 : “Quelque 800 000 personnes ont été massacrées lors du génocide de 1994 au Rwanda”). Dans ce contexte de conflits internes, qu’ils soient hérités de la Décolonisation et de la Guerre Froide ou qu’ils s’agissent des “Nouvelles Guerres” caractéristiques de l’espace international post-Guerre Froide (KALDOR, Mary, New and Old Wars : Organized Violence in a Global Era, 2012), des acteurs politiques et humanitaires internationaux ont promu une évolution du droit pour prévenir de futurs excès de violence d’une telle ampleur.

Dès 1987, un colloque international organisé par la faculté de droit de Paris-Sud fait adopter à l’unanimité une résolution affirmant que “devraient être reconnus [...] par tous les Etats membres de la communauté internationale, à la fois le droit des victimes à l’assistance humanitaire et l’obligation des Etats d’y apporter leur contribution”. Cette résolution, qui sera portée plus tard devant les Nations Unies par la France, a notamment obtenu le soutien du juriste international de renom Mario Bettati et du fondateur de Médecins Sans Frontières Bernard Kouchner. Tandis que cette idée de “droit d’ingérence humanitaire” se répandait, deux discours allaient accélérer le passage au droit positif d’un concept de protection internationale des populations dans un cadre étatique.

Le premier fut donné par le Président de l’Afrique du Sud, Nelson Mandela, au Sommet des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Organisation de l’Unité Africaine à Ouagadougou, Burkina-Faso, en 1998. Nelson Mandela argumentait dans ce discours que le continent africain, partageant la marque du colonialisme et le néo-colonialisme, formait une communauté de destin et devait, en tant que tel, assurer communément la paix et la stabilité en son sein. Nelson Mandela, insistant sur la gestion commune de la sécurité qu’il promouvait pour le continent africain, affirmait qu’il était inacceptable “d’abuser du concept de souveraineté nationale pour nier au reste du continent le droit et le devoir d’intervenir, quand, au sein de cette souveraineté, le peuple est massacré pour protéger la tyrannie”.

Le second discours est celui du Secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, devant l’Assemblée Générale des Nations Unies en 2000 alors que le débat autour de l’intervention humanitaire divise la communauté internationale. A cette occasion, il déclara “s’il l’intervention humanitaire constitue effectivement une atteinte inadmissible à la souveraineté, comment devons-nous réagir face à des situations comme celles dont nous avons été témoins au Rwanda ou à Srebrenica, devant des violations flagrantes, massives et systématiques des droits de l’homme, qui vont à l’encontre de tous les principes sur lesquels est fondée notre condition d’être humain ?”. Ce discours marqua le début du processus de formalisation de la responsabilité de protéger et son intégration finale au droit international promu par les Nations Unies.

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